Le document téléchargeable :
« La liberté pédagogique de l’enseignant s’exerce dans le respect des programmes et des instructions du ministre chargé de l’éducation nationale et dans le cadre du projet d’école ou d’établissement avec le conseil et sous le contrôle des membres des corps d’inspection. Le conseil pédagogique prévu à l’article L. 421-5 ne peut porter atteinte à cette liberté. » Article L912-1-1 Création Loi n°2005-380 du 23 avril 2005 – art. 48 () JORF 24 avril 2005
Les textes réglementaires :
• Pour le baccalauréat général : https://www.education.gouv.fr/bo/21/Hebdo30/MENE2121270N.htm
• Pour le baccalauréat STAV : https://info.agriculture.gouv.fr/gedei/site/bo-agri/instruction-2021-709
Point 1 : Suppression des épreuves communes et des CCF CCF Contrôle Certificatif en cours de Formation et Projet local d’évaluation :
Les enseignements du tronc commun du cycle terminal (sauf l’EPS EPS Éducation Physique et Sportive ) et la spécialité abandonnée en Première du Baccalauréat général et technologique (dont le STAV) sont désormais évalués en contrôle continu pour le bac. Un projet local d’évaluation présente aux élèves et aux parents « de façon synthétique et lisible la politique d’évaluation adoptée dans l’établissement après présentation en conseil d’administration (guide de l’Inspection générale) ».
Projet local d’évaluation ?
« Cette réflexion permet d’élaborer au sein de chaque établissement un cadre réfléchi et organisé au sein de l’équipe pour l’évaluation des élèves, formalisé par un projet d’évaluation (texte de 2 à 4 pages) pour l’établissement partagé à l’échelle de la communauté éducative. Ce travail collégial aboutit à la définition de principes communs, garants de l’égalité entre les candidats, tout en conservant les marges d’autonomie indispensables pour respecter la progression pédagogique adaptée à chaque classe ou groupe d’élèves. »
Deux demi-journées banalisées pour commencer ce projet local d’évaluation.
Pour accompagner les équipes dans leurs travaux, deux demi-journées seront banalisées pour travailler ce document et prévoir sa réalisation.
ou Commission de conciliation ) nécessite une harmonisation, un cadre local (et même national)...dont on confie la définition aux équipes sur le terrain ??
Point 2 : Quels sont les risques pour notre liberté pédagogique ?
• À vouloir formaliser les modalités et les attendus de l’évaluation pour « impliquer » les élèves, le risque majeur est de créer des indicateurs normés aux mains des hiérarchies et des familles pour contrôler en continu l’activité des enseignant.es dans la classe et comparer les pratiques des uns et des autres. Une démarche tout à fait contraire à la liberté pédagogique qui s’exerce dans l’intérêt des élèves avec le souci permanent d’activer tous les leviers à la main de l’enseignant.e pour faire réussir les élèves. Le projet d’évaluation expose les pratiques professionnelles à un contrôle réglementaire par les élèves, les parents, la direction : sa rédaction doit impérativement écarter ce risque de pression locale.
• Les disciplines en épreuves terminales ne sont pas concernées. Les textes ne le prévoient pas. Mais il faudra rester vigilant·es pour que les modalités prévues au projet local d’évaluation ne soient appliquées à toutes les disciplines sans discernement et par facilité de communication avec les parents, notamment pour les Lettres et la Philosophie.
• De la même façon, le projet local d’évaluation n’est prévu que pour le cycle terminal des séries générales et technologiques du lycée. Rien ne permet une généralisation en seconde sauf le passage en force d’un proviseur pour unifier les procédures au prétexte d’un « choc de simplification ». Les équipes peuvent/ doivent s’y opposer.
Point 3 : Comment agir collectivement pour préserver notre liberté pédagogique ?
• Refuser toute précipitation dans la mise en œuvre pour se donner le temps de prendre connaissance des textes (décret, arrêté, note de service et guide le l’inspection générale) portant sur ce sujet et publiés depuis cet été. Ne pas se précipiter à modifier le règlement intérieur.
• Au moment de la rédaction, veiller à rester le plus possible dans les généralités, sans quantifier quoi que ce soit, et en s’appuyant sur ce qui se fait déjà dans le lycée. Le projet d’évaluation doit être « synthétique et lisible »
• S’en tenir à un rappel de grands principes communs à toutes les disciplines qui laissera libres les collègues de faire les choix qu’ils jugeront pertinents avec leurs classes : « des devoirs communs pourront être organisés », « une évaluation globale ou sommative par période sera menée », etc… sans préciser les seuils ni les cadences. Car des principes trop détaillés auraient valeur d’engagement et seraient sources d’éventuelles réclamations de la part des parents. A ce titre, la note de service STAV est déjà bien précise et prescriptive au regard de ce que dit celle de l’EN.
• Présentation dans les instances ne signifie pas validation par les instances ! Il faut refuser toute modification du Règlement intérieur (par un vote au CA) au prétexte de prendre en compte le projet d’évaluation : cela reviendrait à faire valider ce projet par le CA, ce qui n’est pas du tout prévu dans les textes. De la même manière, il faut refuser l’intégration au projet d’établissement. Aucun texte réglementaire ne prescrit de modifier le RI ou le projet d’établissement en fonction du projet d’évaluation.
Point 4 : Les points de vigilance, d’alerte du SNETAP-FSU FSU Fédération Syndicale Unitaire
• Harmonisation, pas Uniformisation : Dans le cadre d’un examen national, une « harmonisation », au sens de sa vraie définition, n’a jamais été remise en cause. Cependant, même dans le cas d’examen, le périmètre croissant des harmonisations et leur tendance à s’approcher de l’uniformisation a déjà soulevé bien des interrogations. Et déjà, à l’échelle d’établissements, c’est bien davantage à des tentatives d’uniformisation auxquelles nous avons assisté. Ont été exigés, par exemple, des progressions communes précises, des périodes d’évaluation fixes, des jalons temporels forts, des évaluations communes fréquentes. Sur quel temps discute-t-on des problèmes rencontrés ultérieurement, des ajustements à faire, des situations imprévues ? Alors que la charge de travail de l’ensemble de l’année ne cesse de s’alourdir et gêne depuis longtemps toute volonté de réelle coordination. Rendre visible la part du travail habituellement invisible est aussi un enjeu fort de la bataille à mener.
• Refuser collectivement la surcharge de travail. Ce passage en cours de cycle à une part de contrôle continu de 40 %... « réclamant une harmonisation » ne doit pas entraîner une augmentation du temps de travail pour les enseignant.es : refusons la collecte par l’établissement, l’enseignant.e coordo, des sujets, des grilles d’évaluation.
• Absentéisme, un flou inacceptable ! Le rattrapage des évaluations posera des problèmes d’organisation compte tenu des réalités très contraintes de la « vraie vie » des établissements (emplois du temps, disponibilité des salles, mobilisation de la vie scolaire…). En aucun cas, cela ne doit induire de nouvelles charges sur les professeur.es et la vie scolaire. Or, sur ce sujet, les textes demeurent flous laissant la porte ouverte à l’interprétation et à la pression locale.
• Pour la fraude, encore une adaptation et une organisation locales… Rien n’est prévu dans les documents réglementaires. Rappelons ici que si le 0-sanction d’un comportement n’est pas autorisé par le code de l’Éducation, il peut tout à fait sanctionner une absence ou un refus de travail sans justificatif.
• Aménagement d’épreuves : exigeons avec les parents d’élèves les moyens pour faire respecter les aménagements d’épreuves pour les élèves à besoin particulier. Refusons le bénévolat. Car les notes de service de juillet 2021 pour le Bac général et septembre pour le STAV confirment que les aménagements concernent le contrôle continu « les candidats peuvent bénéficier d’aménagements ou de dispense d’évaluations en fonction de l’aménagement de leur scolarité. Les travaux organisés pour évaluer les résultats des élèves dans le cadre du contrôle continu doivent prendre en compte les adaptations et aménagements définis dans le cadre des plans d’accompagnement personnalisés (PAP), des projets d’accueil individualisé (PAI) ou des projets personnalisés de scolarisation (PPS), dans les conditions prévues par la réglementation. Ces adaptations et aménagements sont inscrits dans le livret de parcours inclusif de l’élève. » Et pourtant rien n’est prévu pour assurer ces aménagements ni organisation, ni moyens…
• Si l’inspection de l’enseignement agricole est silencieuse sur le sujet, celle de l’Éducation nationale a été très prolixe (guide de plus de 90 pages), rappelons que ce type de document ne fixe en aucun cas une norme. Un guide n’est pas une note de service, qui plus est, elle est de l’infra-règlementaire.
• Rappelons ici aussi que produire un tel document (le projet local d’évaluation), vouloir harmoniser, cadrer les évaluations, faire du contrôle continu des outils de certification, revient clairement à nier notre expertise de professionnel, à s’immiscer dans nos pratiques professionnelles et à transformer le type de relation que nous avons avec nos élèves.