Les Assises ? Tout était déjà dans l’étude de l’OMM parue dès novembre, Les enseignants et la société de la connaissance
A la fin de cette étude, l’Observatoire des Missions et des Métiers du Ministère de l’Agriculture fait 7 propositions dans lesquelles il a concocté ce que l’on pouvait imaginer de pire pour l’enseignement agricole public : depuis l’exercice de notre métier jusqu’à l’organisation des lycées et de l’EAP
EAP
Enseignement Agricole Public
ou
Emploi d’avenir professeur
dans son ensemble.
- Qu’enseigne t-on et comment enseigne t-on selon l’OMM ?
« Dans l’enseignement agricole, à la décomposition des savoirs disciplinaires, quelle qu’elle soit, doit correspondre leur recomposition autour des activités interdisciplinaires. » : l’OMM ne se cache pas d’interroger la pertinence des connaissances universitaires et des disciplines dans l’enseignement...
- Non seulement on se demande ce qui sera au final enseigné et retenu par les élèves, mais aussi on voit là les prémices d’un élargissement de la bivalence, voire pire.
De plus, dans toutes ces propositions, l’accent est mis fortement et à plusieurs reprises sur la professionnalisation de la formation dispensée aux élèves, au point même que jamais la littérature – ou même seulement le français... - , les langues, l’économie générale, l’histoire-géographie, … ne sont citées !
- Les TICE sont censées régler tous les problèmes : difficultés des élèves, échanges entre professeurs et familles, distance entre professeurs et élèves, suivi des élèves, …
- On lit là la mise en oeuvre du mirage de la technique, l’OMM fait comme si nous n’étions pas sortis des XVIIIème et XIXème siècles, périodes où on a tellement rêvé d’une humanité sauvée par le progrès non de la pensée, mais de l’outil...!
- Mais derrière cette prétendue confiance, il y a en réalité la volonté de casser l’EAP avec la fin de l’établissement d’enseignement et la suppression massive des postes d’enseignants : en effet, un cours, plusieurs cours enregistrés, permettent à chacun d’être virtuellement à plusieurs endroits à la fois... c’est le lycée en ligne !
- Il y a aussi le mépris de la situation réelle des conditions de vie en France aujourd’hui : la fracture sociale existe et toutes les familles n’ont pas d’accès internet, et la fracture géographique aussi, les zones blanches dans l’accès à internet restent une réalité. Les « espaces numériques de travail » dont il est question ici, ont été mis en ½uvre à l’EN EN Éducation nationale dans certaines académies avec les problèmes et les discriminations pour certains élèves qu’on peut imaginer...
- Ce qui est également choquant, c’est que l’OMM prétend que seuls les TICE vont régler les difficultés des élèves, permettre de gérer l’hétérogénéité des élèves. Or, n’est ce pas ce que fait tous les jours un enseignant dans sa classe ? Ne sait-on pas différencier le travail de chaque élève, la manière d’appréhender les apprentissages de chacun ??? N’est-ce pas l’essence même de notre métier ?
- Quel statut pour ces enseignants pensés par l’OMM ?
- A la perte de la référence disciplinaire – dont on sait que seules des connaissances universitaires sûres permettent un enseignement de qualité et la confiance des élèves - , l’OMM ajoute le profilage des postes : « la mobilité inter-EPLEFPA EPLEFPA Établissement Public Local d’Enseignement et de Formation Professionnelle Agricole pourrait s’accompagner dans certains cas d’un effort de définition du profil du poste par les DRAAF DRAAF Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt », ces mêmes DRAAF dont l’OMM attend qu’ils agissent dans l’affectation des personnels.
La fin du statut des enseignants comme fonctionnaires d’état est écrite là.
- L’OMM préconise bien sûr la mise en place de qui est appelé à l’EN EN Éducation nationale le Conseil Pédagogique : « création au sein de l’EPLEFPA d’une structure de concertation pédagogique, structure consultative, en amont du CA, pouvant s’appeler « conseil d’animation et de concertation pédagogiques » traitant de toutes les questions pédagogiques transversales ci-dessus et présidée par le chef d’établissement. (…) Elle pourrait être composée de représentants d’enseignants et de formateurs traduisant la diversité des centres et des sites, des disciplines et des champs professionnels. »
- Ces enseignants seraient nommés ? Par qui ? Élus ? Dans quel contexte ? Cooptés ?
Choisis sur quels critères, ceux cités ici, d’autres ? Mais soyons rassurés, les auteurs précisent eux-mêmes qu’ « il ne s’agit pas d’instaurer une sorte de hiérarchie pédagogique »....., on est rassurés !
- Dans ce nouvel organigramme, le directeur-adjoint de l’EPL EPL Établissement Public Local chapeauterait pédagogiquement tous les centres d’enseignement de l’EPLE EPLE Établissement public local d’enseignement . Cela transforme les fonctions actuelles de ces directeurs, et aussi celles des directeurs de centres qui se verront encore plus assujettis à l’autorité de ce directeur adjoint et cela crée en même temps un niveau hiérarchique pédagogique supplémentaire et intermédiaire entre les enseignants (dont les auteurs, malgré tout, ne craignent pas de dire qu’ils conservent quand même leur autonomie pédagogique comme on l’a lu plus haut …) et l’Inspection.
- Que sont les établissements dans cette vision OMMesque ?
- Ce serait des lycées virtuels, on l’a vu plus haut. Ce serait aussi des lieux d’autonomie en matière d’enseignement, en matière d’organisation entre les centres dont la différenciation dans le statut juridique est annulée acr l’OMM tient à « valoriser davantage la possibilité d’une intervention dans plusieurs centres du même EPLEFPA d’exercice (lycée, CFA
CFA
Centre de Formation d’Apprentis
, CFPPA
CFPPA
Centre de Formation Professionnelle et de Promotion Agricole
(formation continue pour adultes) ) à la faveur de la réforme de la voie professionnelle. »
- Cette réforme de la voie professionnelle est plusieurs fois citée dans ce rapport comme le support de toutes ces dérèglementations.
- En effet, ce qui est écrit ici, c’est la fin du statut des enseignants du secondaire et la fin des espoirs des enseignants des CFA et CFPPA à pouvoir accéder à de meilleures conditions de travail.
- C’est la mise en place généralisée de l’annualisation qui génère l’augmentation du temps de travail et une disponibilité accrue. Ce serait aussi l’assujettissement de l’ensemble des enseignants aux politiques locales des conseils régionaux, voire des chambres d’agriculture.
- Et à tout cela s’ajoute la constatation que le rapport insiste sur l’obligation de résultats, comme si la formation des citoyens et des professionnelles pouvait être quantifiée avec des critères intangibles et assurés.
Tout au long de ces 7 propositions, jamais le mot de professeur n’est écrit, quelquefois celui d’enseignant, le plus souvent celui de formateur.... Et l’OMM ne connait ni élève, ni collégien, ni lycéen, ni étudiant, ni apprenti, ni stagiaire, il n’y a que des apprenants...
- Enfin, emportés dans un délire techniciste et linguistique, l’OMM voit Les TICE comme un « vecteur d’échange et de coopération, permettant à l’EPLEFPA de devenir une organisation apprenante. »
- Si les mots ont encore un sens, ce dont rêve l’OMM, ce n’est évidemment pas d’un établissement d’enseignement, mais d’un ensemble centré sur lui-même : en effet si c’est la structure qui, dans son ensemble, est « apprenante », c’est qu’il n’y a pas de possibilité pour les enseignants – ou ce qu’il en reste... - de se ressourcer et de progresser ailleurs, c’est la fin du souci de ce qui est enseigné, c’est c’est aussi la fin du rapport du maître à l’élève dont on sait ce qu’il a de structurant pour la construction de la pensée. Tout simplement et plus franchement, les auteurs pourraient, comme on l’a vu à plusieurs reprises, écrire « entreprise de formation en ligne »