Monsieur le Ministre de l’Agriculture,
La réunion de la Commission Consultative Professionnelle (CPC) du 18 décembre 2014 avait pour objet l’avis sur le projet de référentiel de diplôme du CAP
CAP
Commission administrative paritaire
C’est une instance de représentation et de dialogue de la fonction publique française.
Les CAP sont chargées d’examiner des situations individuelles, mais elles soumettent aussi parfois des motions à caractère collectif.
Agricole "Métiers de l’agriculture".
Ce projet de référentiel avait déjà été porté devant la CPC pour avis le 12 novembre dernier mais le vote avait été finalement repoussé faute de consensus sur plusieurs éléments de fond importants. Le mois écoulé entre ces deux réunions devait donc être l’occasion, selon vos propres termes, de négociations entre l’administration et les représentants syndicaux.
Il n’en a rien été puisque le texte présenté aux membres de la CPC le 18 décembre était, hormis quelques éléments de forme, le même que celui de la mi-novembre.
Nos trois organisations syndicales (FSU - FO
FO
Force ouvrière
- CGT
CGT
Confédération générale du travail
), confortées dans leurs mandats après les élections professionnelles du 4 décembre, ont donc quitté la réunion après avoir redit dans une déclaration commune leur opposition ferme aux propositions d’évolutions du référentiel CAPA
CAPA
Certificat d’Aptitude Professionnelle Agricole
Commission Administrative Paritaire Académique
sur les points concernant les modalités d’évaluation, le nombre aléatoire de semaines de stages, le développement des heures non affectées et l’absence de prise en compte de la formation des élèves à la sécurité avant le départ en stage.
Sur les modalités d’évaluation des élèves, nous soulignons d’abord l’incohérence qu’il y a à annoncer un débat général dans quelques mois sur ce thème et de refuser que le CAPA entre dans cette réflexion nationale. Nous continuons à affirmer que ce débat est nécessaire pour permettre de
discuter de toutes les modalités d’évaluation niveau par niveau.
Nous restons opposés à un passage du CCF
CCF
Contrôle Certificatif en cours de Formation
à 80 % dans la validation des diplômes.
De la même façon, proposer une nouvelle modalité d’évaluation (le contrôle continu) dans ce référentiel est inacceptable alors que ce nouveau mode d’évaluation pour les élèves de la formation professionnelle n’a jamais été discuté ou expérimenté dans l’enseignement agricole.
Nous rappelons encore que lors des différentes réunions des Commissions Nationales Spécialisées (CNS
CNS
Commission Nationale Spécialisée
), des représentants de la profession ont exprimé une grande inquiétude voire un mécontentement face à l’abandon de véritables épreuves terminales et nationales notamment pour les parties professionnelles et techniques.
Par exemple, alors qu’il est clairement annoncé que l’évaluation se fait dans une logique capacitaire à partir de situation contextualisée, il est difficile de comprendre pour eux (comme pour nous) que l’épreuve ponctuelle terminale E4.1 soit une simple épreuve orale d’explicitation de pratiques
professionnelles s’appuyant sur des fiches d’activité.
Nos trois organisations syndicales contestent la volonté de la DGER
DGER
Direction Générale de l’Enseignement et de la Recherche
de passer en force à 80 % la part des CCF dans le diplôme du CAPA et demandent une mise à plat de l’évaluation à partir de laquelle pourront être prises les décisions pour la rénovation du CAPA qui engagera le ministère sur
plusieurs années.
Sur les six semaines de stage supplémentaires possibles au-delà des 12 semaines inscrites normalement dans le référentiel, nos trois organisations s’interrogent sur la capacité réelle des établissements à les mettre en ½uvre. Ce nombre de semaines est trop élevé car 6 semaines prises sur la scolarité représentent plus de 15 % du temps pris sur le temps de présence des élèves en milieu scolaire. Elles ne peuvent donc aboutir qu’à un décrochage du jeune par rapport à la progression pédagogique. Ces semaines supplémentaires ne feraient ainsi qu’écarter certains jeunes dès la fin du CAPA de la formation initiale avec un retour ultérieur en formation continue très complexe.
De plus nous nous interrogeons pour savoir sur quels critères les élèves pourraient être orientés vers ces stages supplémentaires.
Sur la non affectation disciplinaire de 5 heures, nos trois organisations refusent avec force, cette mesure présentée comme une nouvelle modalité d’individualisation. Ce non fléchage ne cherche qu’à réduire les ETP
ETP
Équivalent Temps Plein
d’enseignants. En prélevant respectivement 2 heures sur les disciplines
générales et 3 heures sur les disciplines professionnelles, cela permet de réduire d’autant le volume horaire des chaires et donc les ETP. C’est inacceptable.
De plus cette proposition renvoie aux équipes pédagogiques le partage de ces heures non affectées ce qui causera de nombreuses tensions au sein des établissements.
Sur la préparation des élèves au départ en stage et la formation à la sécurité, nous dénonçons le peu d’ambition dans le projet de référentiel sur ces questions. Nous constatons une différence importante de traitement de cette question entre ce niveau 5 et les niveaux 4 et 3. Par exemple ici il
n’est jamais fait allusion à une formation au secourisme contrairement au Bac Pro. Nous rappelons notre attachement au renforcement des conditions de sécurité lors de l’accueil d’élèves en stage qui passe évidemment par une préparation de ces jeunes stagiaires. Pour des garanties dans l’équité de la formation initiale par apprentissage rien n’est prévu à ce stade. Pourtant la préparation à la sécurité des apprentis, avant leur première période en entreprise, est un enjeu majeur. De plus nous regrettons pour la formation initiale par apprentissage l’absence d’éléments réglementaires et de recommandations pédagogiques qui garantiraient l’équité dans la formation entre les centres et les régions.
Sur ces cinq points des évolutions majeures doivent permettre de donner une réelle ambition au projet de référentiel CAPA pour que ce diplôme de niveau V ait à la fois une vocation d’insertion professionnelle et de poursuite d’études vers un diplôme de niveau IV.
A ce stade, pour atteindre ces objectifs, nos trois organisations demandent le report d’un an de la réforme du CAPA pour une mise en ½uvre à la rentrée 2016.
Dans l’attente de votre réponse nous vous prions de croire, Monsieur le Ministre, à l’expression de notre haute considération.
Michel Delmas (FO), Jean-Marie Le Boiteux (SNETAP), Philippe Duffaut (CGT)
Paris le 19 décembre 2014