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Loi d’avenir pour l’agriculture

Bulletin n° 358 - complément - Entretien avec Régis Hochart, secrétaire national de la Confédération paysanne

dimanche 8 décembre 2013

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Le volet Agriculture : Questions à Régis Hochart, secrétaire national de la confédération paysanne

  • 1- Quelles évolutions de l’agriculture et des exploitations suggérez vous ?

Deux éléments principaux doivent être pris en compte :

Depuis 60 ans on a développé une agriculture « chimie-pétrole », caractérisable par sa tentative de s’affranchir du milieu naturel.
Simultanément, la France s’oriente vers une végétalisation grandes cultures. Cette « céréalisation » de la France entraîne une considérable perte d’activité dans la production agricole ( 1,1 UTA/100ha de GC pour 2,4 UTA pour 100ha de Vaches Laitières ). De nouveaux débouchés existent bien, mais l’exportation de grain ne génère aucune valeur ajoutée. Et les hectares de GC en plus (+10% sur 10 ans) sont autant d’hectares en moins de Productions animales, fruits, légumes, vigne... ; et donc la disparition progressive des productions qui alimentent les entreprises agroalimentaires ; et donc la disparition déjà entamée de la transformation alimentaire en France.
Limiter la « céréalisation » de la France et s’orienter vers une agriculture économe en ressources fossiles et qui s’appuie sur les processus biologiques (l’agroécologie) sont donc deux impératifs ; ils doivent se traduire par un développement généralisé de l’agriculture paysanne.

  • 2- Y a t-il dans cette loi des éléments qui vous gênent ou avec lesquels vous êtes en désaccord ?

Le projet de Loi ne balaie pas tout le spectre des domaines à faire évoluer ; ainsi, par exemple, la fiscalité en agriculture devra faire dans l’avenir l’objet d’une réforme complète ; différents thèmes abordés dans le projet de loi peuvent être renforcés : les problématiques foncières justifient un renforcement de la politique des structures, du rôle des Safer, du Registre Général de l’Agriculture,.. au delà de ce que prévoit le projet ; le maintien d’une activité économique de l’agriculture et de la transformation justifieraient de rénover plus fortement les missions des interprofessions, de la contractualisation, de médiateurs ; une remise à plat du statut et du rôle de la coopération serait nécessaire, sur la base de ce que chaque coopérative contribue ou non à la recherche de l’intérêt de la collectivité.
Concernant la forêt, la loi doit apporter des réponses à la question centrale : comment pouvons nous valoriser le bois qui est actuellement dans nos forêts ; que la France vende la plupart de ses hêtres sous forme de grumes à la Chine qui nous les retourne sous forme d’escaliers, de meubles... devrait plus nous interpeller.
Quant à la politique agricole en Outremer, l’objectif d’augmenter la production à vocation locale est bon, mais les moyens proposés n’y suffiront pas.

Suite de l’article publié dans le Bulletin L’enseignement agricole, n°358 novembre 2013

  • 3- le projet de loi consacre à l’enseignement agricole un volet incluant l’enseignement technique, l’enseignement supérieur et la recherche. Quelles appréciations avez vous de ce volet ? Quelles suggestions faites vous ?

Au regard des orientations évoquées précédemment une réforme globale des contenus de formation apparaît nécessaire, ce que le projet de loi évoque peu ; les connaissances en biologie, agronomie, écologie, économie des territoires et économie rustique doivent devenir un socle de la formation, de la recherche et du conseil agricoles. La part donnée à l’observation doit être affirmée. Dans l’enseignement technique, nous estimons que les exploitations agricoles des lycées agricoles doivent être le pivot de la formation, et leurs salariés formés au rôle pédagogique qu’ils seront amenés à endosser.
Pour ce qui est de l’enseignement supérieur et de la recherche, la multiplication des passerelles entre les différents acteurs, et leur mise en résonance nous paraissent une très bonne orientation. Pour autant, les regrouper sous un chapeau commun nous semble être un des choix les moins pertinents possibles pour y parvenir, tant les risques de dérives s’en trouveraient renforcés.
Se pose aussi la question du conseil en agriculture qui devrait y être adossé ; absente de la loi, la réforme des chambres d’agriculture est pourtant incontournable. Comment imaginer encore durablement que la même entité puisse simultanément tenir les rôles de représentation des agriculteurs et de mission de service public d’autre part ? Ce qui était possible dans les années 1960/1990 ne l’est à l’évidence plus, tant les enjeux ont changé.

  • 4- " Il est temps d’oser " c’est votre appréciation du projet de loi d’avenir repris dans la presse. Comment envisagez-vous de porter votre message ?

Tout d’abord en soutenant sans faiblir les avancées que ce projet énonce et qui feront l’objet d’attaques, comme par exemple « l’Activité Minimale d’Assujettissement », la réforme des SAFER, le Registre Général de l’Agriculture...
En portant auprès des parlementaires (dans leurs circonscriptions et au parlement) et de leurs groupes les renforcements qui nous apparaissent nécessaires.
En les portant avec les autres acteurs du monde agricole, agroalimentaire et rural qui ont les mêmes objectifs que ceux que nous affirmons.