Les 60 mesures pour l’EAP
EAP
Enseignement Agricole Public
ou
Emploi d’avenir professeur
... et si on en parlait !
Analyses du SNETAP (1)
- Dès le 10 novembre, le SNETAP était prêt à mettre en regard ses 21 propositions avec les mesures du Ministre pour l’EAP... Pour autant, ce fut un rendez-vous manqué, le Ministre ayant préféré différer d’un mois plutôt que de faire face aux personnels venus lui demander des comptes ; quant au 10 décembre, force est de constater que nous avons assisté à un exercice de communication à sens unique, le Ministre prenant soin de lever la séance juste après qu’il ait fini de s’exprimer... Drôle de conception du dialogue social et même du dialogue tout court, mais sans doute à l’image de cette conférence de presse organisée en amont de la séance de clôture, les journalistes n’étant pas forcément les bienvenus pour assister à cette grand messe dont il craignait sans doute qu’elle tourne mal... en terme de communication s’entend.
- Au-delà des communiqués, le temps de l’analyse est venu et c’est ici une première levée que le secteur Politique Sociale et Laïcité du SNETAP entend livrer à l’ensemble des membres de la communauté éducative concernant 8 mesures loin d’être anodines pour nos établissements publics dans le catalogue des 60, censé constituer pompeusement et abusivement dans l’affichage ministériel un « pacte renouvelé » pour l’EAP.
- En regard de la proposition n°5 du SNETAP-FSU FSU Fédération Syndicale Unitaire : « Mise en place d’une partie EAP dans un 5ème Schéma révisé et de PREAP (Projets Région de l’Enseignement Agricole Public) afin de penser un véritable projet de développement de l’offre publique et mettre un terme aux concurrences entre établissements »
- Mesures 15 et 60 : Construire dans chaque région un projet pluriannuel pour l’enseignement agricole public (2011) / Joindre « le pacte renouvelé pour l’EAP » en addendum au 5ème Schèma prévisionnel des formations (février 2010)
- Attendue depuis plus d’une décennie, cette proposition du SNETAP a enfin été entendue. Les composantes de l’enseignement privé disposant de projets régionaux des évolutions de structures, le SNETAP espère ainsi que le service public d’EA puisse enfin être organisé en région. En effet, la plupart des DRAAF DRAAF Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt , contrairement aux obligations qui leur sont faites par la Constitution, s’y sont jusqu’alors refusés. Cette grave dérèglementation a eu pour effet de mettre les établissements publics d’EA en concurrence entre eux face à des composantes privées organisées. Le SNETAP regrette par ailleurs que le schéma national ne décline pas lui aussi une partie propre à l’EAP. Tout au plus le Ministre prévoit dans sa mesure 60 que le pacte pour l’EAP soit annexé au 5 ème schéma. Le SNETAP demande que cette adjonction fasse l’objet d’un nouvel arrêté.
- En regard de la proposition n°7 du SNETAP-FSU : « Maintien et soutien aux établissements et sites de l’EAP, mais aussi réouverture de ceux qui ont été fermés dans un souci de préservation du maillage territorial, avec la fin de la politique de plafonnements arbitraires des effectifs qui de fait fragilise durablement l’offre publique »
- Mesure 17 : fédérer les EPLEFPA EPLEFPA Établissement Public Local d’Enseignement et de Formation Professionnelle Agricole en pôle de compétences (2010-2012)
- Si le terme « fédérer » signifie organiser le service public dans un projet régional, le SNETAP est d’accord. En revanche, le SNETAP est opposé à toute velléité de fusions d’établissements qui trouveraient leur origine dans la volonté de suppressions d’emplois publics. De même, définir nos EPLEFPA en pôles de compétences trouve toute sa signification dans le protocole de la réforme de la voie professionnelle qui tend à organiser la formation en parcours individualisés, alternant formation initiale scolaire et apprentissage, auxquels le SNETAP est vertement opposé. Enfin, si cette notion de pôle peut permettre un gain en terme de lisibilité de l’offre de formation, en revanche elle peut aussi être facteur de fragilisation de certains de nos établissements, dans le cadre d’une spécialisation à outrance. Le SNETAP considère en conséquence comme nécessaire de ne pas limiter arbitrairement à un champs professionnel l’offre de formation des établissements publics agricoles. Il apparaît préférable, plutôt que de fédérer artificiellement les EPLEFPA en pôle de compétences dans une logique de rationalisation en décalage avec les réalités territoriales et les besoins des usagers, de s’assurer d’une cohérence de l’offre de formation dans le cadre du projet régional de l’enseignement agricole public prévu à cet effet.
- Mesure 18 : assouplir les contraintes juridiques de structuration des EPLEFPA (Loi de Modernisation Agricole)
- S’il s’agit comme le prévoyait la Loi d’Orientation Agricole de 1999, de transformer tous les LEGTA LEGTA Lycée d’Enseignement Général et Technologique Agricole et LPA LPA Lycée Professionnel Agricole en LEGTPA LEGTPA Lycée d’Enseignement Technologique Professionnel Agricole et de lever toute ambiguïté quant à la légitimité des petits établissement ne comportant que deux centres constitutifs, afin de donner une priorité à l’enseignement agricole public, alors le SNETAP répondra favorablement. Mais dans le contexte politique actuel, nous ne sommes absolument pas persuadés d’une telle intention, et pensons au contraire que les assouplissements envisagés, correspondent à des dispositions permettant de faciliter les restructurations et fusions en cours. Évidemment, sur ce terrain, le Ministre devra affronter l’opposition résolue du SNETAP et de l’ensemble des personnels.
- En regard de la proposition n°19 du SNETAP-FSU : « Respect de l’autonomie pédagogique dans le cadre des textes réglementaires en vigueur (référentiels, statuts...) et des instances existantes, réaffirmation du caractère national des diplômes comme des programmes et instauration de volumes horaires dédiés au soutien et à la mise à niveau dans le cadre des grilles horaires adossées aux référentiels »
- Mesure 22 : recentrer les conseils d’administration sur l’orientation stratégique par la création d’une commission permanente (2ème semestre 2010)
- Depuis la déconcentration et le contrôle de gestion, le fonctionnement démocratique des établissements est en forte régression. Ainsi de nombreuses compétences des instances et notamment des CA sont aujourd’hui galvaudées par des décisions prises entre les différents niveaux de l’Etat (DGER DGER Direction Générale de l’Enseignement et de la Recherche -RAAF-chef d’établissement). Il en est ainsi des évolutions des structures (ouvertures et surtout fermetures et gels de classes et sections). De même l’adhésion des établissements à des réseaux et les décisions prises dans les structures de décision de ces réseaux ne donnent pas lieu à des comptes-rendus d’activités et à des consultations préalables que les administrateurs des CA d’EPL EPL Établissement Public Local sont en droit d’attendre. Par la mesure proposée, les élus n’ont aucune assurance que celle-ci répondra aux problèmes précités et que cette commission, si ses prérogatives sont les mêmes que celles assignées aux commissions permanentes des établissements de l’Education Nationale, amélioreront le fonctionnement. Le SNETAP met en garde contre la volonté qui consisterait à réduire les prérogatives des CA par la création d’une commission permanente sous couvert d’un temps libéré « aux débats de fond ».
- Mesure 23 : mettre en place un dialogue de gestion annuel entre la DRAAF et l’EPLEFPA , basé sur des projets d’établissement rénovés (2010-2012).
- Le SNETAP note l’intérêt d’avoir substitué l’EPL au chef d’établissement ce qui à nos yeux peut être perçu comme plus démocratique. Cependant, le projet d’établissement ne peut seulement répondre au seul critère de gestion, il semble utile de rappeler à ce sujet que le projet pluriannuel pour l’enseignement agricole public dit définir les orientations conformément à l’article L 111.-1 du code de l’éducation : « le service public est conçu et organisé en fonction des élèves et des étudiants. ». Et in fine, quelle transparence et quel contrôle par les administrateurs seront ici garantis ?
- Mesure 50 : Créer le conseil de l’éducation et de la formation dans les EPLEFPA (Loi de Modernisation Agricole)
- Le conseil de l’éducation et de la formation est un transfuge du conseil pédagogique que les collègues de l’Education Nationale rejettent et que le SNETAP a condamné dans sa contribution aux Assises : « Conseil Pédagogique : de la fausse bonne idée à ... ». Réclamé par les signataires du protocole de la réforme de la voie professionnelle auquel s’est rajouté le SEA-UNSA UNSA Union nationale des syndicats autonomes , ce conseil a pour objectif d’accompagner le désinvestissement éducatif de l’Etat en établissant à l’échelle des EPLEFPA une réponse éducative par des parcours de formations parcellisés avec des étapes de formation alternant de la formation initiale par voie scolaire avec de la formation par apprentissage ou professionnelle adulte. De surcroît, la cooptation des membres le composant enlèvera toute velléité à s’opposer à cette conception de la formation. Par ailleurs, gageons ainsi que la mixité des publics a de beaux jours devant elle. En revanche, les statuts des personnels risquent forts d’être vidés des garanties qui leur sont propres. Le Ministre a prévu pour mettre en place ce conseil d’avoir recours à la loi de modernisation de l’agriculture, il restera au SNETAP d’établir un rapport de force susceptible de convaincre le Ministre de renoncer à cette insertion dans le projet de loi.
- Mesure 51 : donner le droit à l’expérimentation pédagogique aux établissements (Loi de Modernisation Agricole)
- Il s’agit de donner par la la loi de modernisation de l’agriculture, une légalité à des pratiques que le SNETAP a condamné et continuera de condamner. Sous couvert d’expérimentations, des mixages de publics notamment sont réalisés en dehors de tout cadre règlementaire et aucune d’entre-elles ne fait l’objet d’un véritable protocole d’expérimentation afin de vérifier qu’à la sortie de ce processus expérimental les objectifs des formations conduites selon ces principes ont véritablement été atteints. En fait, ce droit à l’expérimentation n’a d’autre objectif que d’accompagner d’une part le désengagement de l’Etat en reportant sur les collectivités territoriales les coûts de formation et d’autre part de déroger aux statuts des personnels.
Au sortir de cette première série d’analyses, force est de constater l’écart important, sinon le gouffre, qui existe de fait entre les revendications légitimes portées par les personnels et les mesures préconisées par le Ministre... sur fond de maintien du cap libéral fixé par le gouvernement auquel il appartient...